Magdalena. [T]

MAGDALENA GRAY
GLORY BOX *

« 31 mai.

Déjà le 31 mai et voilà que j'entame cette chronique (il est triste de constater que notre langue ne possède qu'un vocabulaire restreint qui m'oblige à utiliser un mot que j'ai toujours trouvé atroce), sans introduction ni envolées philosophico-littéraires (mot sorti tout droit de mon encéphale bouillant, alors copyright, all rights reserved, etc.). En même temps, je me vois mal commencer par « cher journal », et d'une parce que le fait de donner un tel adjectif à un objet est complètement stupide, et de deux parce que j'écris présentement sur un morceau de parchemin désespérément solitaire et non dans un quelconque ouvrage relié. J'entame donc cette chronique (argh) le plus simplement possible, du moins j'en avais l'intention mais je m'égare déjà. Des fourmillements envahissent mes bras, comme chaque fois que j'écris, et font trembler la plume de faisan qui en est devenu le prolongement quasi-naturel ces derniers temps. Je suis mi-femme, mi-oiseau, il me pousse une aile au bout de la main droite. J'avoue que j'aime assez l'idée. Mais en réalité, je ne suis ni une femme, ni un idiot de piaf, on m'a gracieusement octroyé le confortable rang de « rien du tout ». Pareillement à tous les ados, je ne suis personne, je regrette déjà mais je n'espère pas encore. Seulement moi, je ne suis pas tout à fait comme les autres. J'ai l'insigne honneur de porter l'étiquette « rien du tout mais riche, mais blonde, mais Sorcière de presque dix-sept ans ».

Je me suis un peu présentée. Je sais ce que vous pensez, j'entends déjà vos hauts cris, mais jamais vous ne connaîtrez mon nom, vous ne le méritez pas. Alors mes chéris, rangez vos langues dans vos bouches béantes et dégoûtantes, et suivez un peu ce qui se dit. Puisqu'il faut bien débuter quelque part, je dirais tout d'abord que je suis née un 31 décembre. C'est comme ça, et à vrai dire, je m'en fous. Si j'étais née le premier janvier de l'année suivante, ma vie n'aurait pas été tellement différente. Et puis moi, mon rêve, c'est de mourir le jour de mon anniversaire juste devant la vitrine de Victoria's Secret, bien au chaud dans mon manteau Burberry et une clope dans le bec. Exit les lunettes de soleil, malheureusement, parce qu'en hiver, c'est peu plausible - et les lunettes de ski, c'est quand même moins classe. Elles seront donc dans ma poche, parce que je refuse de crever séparée de mes Ray Ban. A chacun de mes anniversaires, depuis cinq ans, je les porte sur moi toute la journée. J'imagine que c'est pour conjurer le sort. Du genre : si ce n'est pas pour aujourd'hui, j'ai encore au moins un an. C'est peut-être crétin mais c'est ma seule superstition. Alors ayez la décence de planquer vos horoscopes avant de me faire la moindre remarque.

Revenons à l'Histoire de ma Vie - je mets des majuscules, j'ai tous les droits sur cette page. J'ai toujours été paumée quelque part. Au sens propre. Quand j'étais gosse, je passais mon temps à chercher ma chambre et à hurler le nom de ma mère dans le château pour la trouver. Il y avait quatre étages, et, en tout, huits cent trente six pièces. Sans compter le grenier, ni la cave pleine de grands crus. Je n'allais pas à l'école. Je vivais en France, au fin fond de la Normandie. Ma mère en est originaire, et je lui dois mon prénom affreux. Alors, quand je parle de moi, je l'écorche. Volontairement. Aucune raison de respecter la mémoire de cette bonne femme acariâtre et ambitieuse. Mais à l'époque dont je parle, elle n'était pas encore six pieds sous terre. Mon père, il n'était pas là. Mais chaque fois qu'il se pointait chez nous - une fois par mois, à peu près - il me ramenait des jouets que j'égarais aussitôt. Je n'ai jamais été très ordonnée. Je vous vois déjà sourire en lisant ça. Arrêtez immédiatement, l'attendrissement me fait horreur. Je suis bien réveillée, je suis là maintenant, et la nostalgie, c'est pour les lâches. Les peureux se réfugient dans les beaux souvenirs pour oublier les peines du présent. Ils n'affrontent rien du tout, ils passent toute leur vie en étant à moitié morts. Je ne suis pas comme eux. Mes yeux bruns flamboient, je suis courageuse. Mes parents, eux, étaient ce genre d'idiots. Maintenant, mon père est désabusé et passe ses journées devant la cheminée en se demandant si le fait que sa fille soit une Sorcière est un affreux cauchemar, si ses actions se portent toujours bien du côté de Wall Street, et accessoirement, si la nuisette préférée de feu sa femme était rose ou mauve. Ma mère, quant à elle... Mais vous savez déjà, c'est vrai. Elle est enterrée dans le grand parc à l'abandon. Vous imaginez plus glauque ?
Comme je le disais, j'ai passé ma jeunesse perdue comme le Petit Chaperon Rouge, hésitant sans cesse entre deux portes. Je trouve ça très symbolique.

Je sens qu'un détail vous titille. J'ai fait mention, plusieurs fois il me semble, de Magie ou de Sorcellerie. Eh bien, je n'aurai qu'une chose à dire : si vous êtes sceptique et Moldu, et si vous ne savez pas ce que Moldu veut dire, alors prenez cette histoire comme une pure invention, les divagations vaguement intellectuelles d'une adolescente timbrée en mal d'affection. Je suis même quasi certaine que vous saurez mêler Freud à ça, et me psychanalyser à partir de ces quelques lignes. Pour les autres, ceux qui savent à quoi je fais allusion, eh bien... Tant mieux pour eux. Il se trouve que je suis entrée à Poudlard, Ecole de Magie renommée, grâce à mon père. Il eût en effet été plus naturel que j'aille à Beauxbâtons ; cependant, il était au départ prévu que nous habitions à Londres, et, comme chacun sait, les élèves sont inscrits dans les registres de l'académie depuis leur naissance. J'entre à Poudlard donc, en 2101, l'année de mes onze ans. Je ressens encore l'étrange contraste chaud/froid de la vapeur grise du train mêlée au vent déjà glacé de septembre. S'ensuivent ma Répartition, la découverte du château, les liens qui se créent avec les petits camarades, l'affreux goût du jus de citrouille, etc. Et puis les bagarres avec les Serpentard, avec pas mal de monde d'ailleurs, et enfin le Quidditch. Pour ceux qui seraient largués, même remarque que précédemment. Le Quidditch, indescriptible. Une vraie compétition, qui motive, personne n'ayant envie de se faire battre par une bande de léards puants. Voler, voler et avoir un but, on se sent tellement libre qu'on se vide de tout mais sans se remplir de n'importe quoi. Pendant quelques heures, on est maître de soi, et, quand on est maître de soi, on est maître de tout. Les Rois du Monde.

C'est marrant, hein. Je n'arrive pas à poser ma plume, même si c'est pour écrire des inepties. Je crois bien que j'ai tellement ressassé ma propre vie durant toutes ces années, que je parviens maintenant à la synthétiser en une demi-heure. Seize ans et demi pour une demi-heure. Je ne suis rien du tout. Et vous, vous êtes encore moins. »

QUESTIONS HJ.

Comment avez-vous découvert ce forum ? Top Site, sûrement, mais... ça fait un bout de temps alors je suis pas sûre. XD
Comment trouvez vous le design' de ce forum ? (C'est marrant, chaque fois que je crée un nouveau perso, le design est différent du précédent x3.) Ben, superbe. <3
Comment trouvez vous l'intrigue de ce forum ? Nickel. =)
Avatar : Kristen Bell.